Coévolution entre hôtes et parasites

Un des buts principaux de la biologie évolutive est de comprendre l’adaptation des organismes à leur milieu. Mais ce milieu peut parfois être constitué d’un autre organisme vivant, comme c’est le cas dans les relations entre hôtes et parasites. Ce milieu peut alors changer très rapidement, car il est lui-même capable de s’adapter.

Par définition, un parasite est un être vivant qui vit aux dépends d’un autre organisme vivant, en utilisant ses ressources. Les parasites évoluent donc en s’adaptant à leur hôte, mais l’hôte en retour évolue pour échapper à son parasite. Il s’ensuit une course aux armements entre hôtes et parasites, que l’on appelle coévolution. Les processus de cette coévolution sont essentiels à comprendre pour lutter au mieux contre les maladies, que ce soit sur l’homme, les animaux, ou les plantes cultivées.

Plusieurs équipes de l’IDEV étudient la coévolution, notamment à l’ESE, au LEGS, à l’IGM et à l’IBP en particulier sur les champignons pathogènes de plantes, les insectes herbivores, et les animaux ravageurs de cultures. Il s’agit de comprendre les mécanismes de résistance des plantes et les stratégies de contournement de ces résistances que les parasites développent en retour. Là aussi, différentes approches sont utilisées. Tout d’abord sont analysés les mécanismes de défense des plantes et les mécanismes d’attaque des parasites, au niveau phénotypique, physiologique et génétique. Les gènes impliqués dans les mécanismes de défense des plantes, ou dans la pathogénicité des parasites, sont ensuite étudiés pour détecter la nature et la force des pressions de sélection qui s’exercent sur ces caractères. Des méthodes récentes d’analyses de polymorphisme permettent par exemple de déterminer si un gène a récemment changé de fonction, s’il a évolué rapidement, ou si plusieurs allèles qui confèrent des résistances ou virulences différentes ont été sélectionnés à tour de rôle dans les populations, et de façon récurrente. La course aux armements entre hôtes et parasites mène en effet à la sélection d‘un gène de résistance chez une plante, puis à un gène de pathogénicité chez le parasite pour contourner cette nouvelle résistance. En retour un nouveau gène de résistance peut être sélectionné chez la plante, ce qui entraînera une sélection d’un nouvel allèle de pathogénicité chez le parasite. De telles courses aux armements laissent leurs empreintes au niveau génétique et nous sommes maintenant capables de les détecter.

Un autre aspect intéressant à étudier dans les relations entre hôtes et parasites est le niveau de virulence optimal qui devrait être sélectionné chez un parasite. Doit-il ménager son hôte pour le garder vivant et ainsi utiliser ses ressources le plus longtemps possible ? Ou doit-il au contraire utiliser un maximum de ressources le plus rapidement possible, quitte à tuer son hôte ? En d’autres termes, doit-il provoquer une maladie grave ou une maladie bénigne ? La stratégie optimale du parasite peut dépendre de plusieurs facteurs, notamment de la présence d’autres hôtes disponibles dans l’environnement proche, ou du fait qu’il partage son hôte avec d’autres souches de parasites qui sont en compétition avec lui pour soutirer les ressources de leur hôte. Les laboratoires de l’IDEV étudient expérimentalement les niveaux de virulence de champignons pathogènes de plantes, et leur variation en fonction de différents paramètres, pour comprendre comment évoluent les niveaux de virulence des parasites, et donc la gravité des maladies.

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Tatiana Giraud, Laboratoire Ecologie, Systématique et Evolution, Université Paris-Sud 11

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