3 questions à Guy Couarraze, président de Paris-Sud 11

Quelles perspectives pour l’Université ?

Guy Couarraze a pris ses nouvelles fonctions le 16 janvier dernier. Il a accepté de nous livrer le regard qu’il porte sur sa fonction, ses priorités d’actions ainsi que sur l’avenir de notre Université.

© M.LECOMPT

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Comment concevez-vous votre rôle de président de l’Université?

Le changement du mode de désignation du Président n’est pas sans incidence sur la conception que l’on peut avoir de cette fonction. Pour la première fois, les élections des conseils se sont faites sur la base d’un programme clair, connu de tous, qui a été soumis à concertation, à discussion et à critique. L’ensemble des personnels de l’université, y compris les personnels des organismes de recherche ont été appelés à y participer, cela aussi est nouveau. En tant que tête de liste, j’ai porté le programme sur la base duquel notre liste a été élue et sur lequel je me suis engagé pour quatre ans. Cette démarche qui a abouti à mon élection, doit se poursuivre pendant la gouvernance, dans un cercle vertueux, associant concertation et respect des engagements. Autre conséquence bénéfique, il y a désormais une coïncidence entre le renouvellement du président et celui des conseils. Cela renforce les liens entre le Président et l’équipe présidentielle et favorise le travail en équipe. Cette équipe, je l’ai bien sûr renouvelée, en l’élargissant à de nouvelles personnalités et à de nouvelles compétences. Cohésion renforcée donc au sein de l’équipe présidentielle, mais aussi plus largement au sein de notre établissement, avec les composantes et les services. Il me semble que, plus encore que jamais, le président d’une Université comme Paris-Sud 11 doit être un élément fédérateur de notre communauté. Enfin, à titre tout à fait personnel, je pense que dans cette période où des engagements forts sont demandés à toute notre communauté, les acteurs qui la dirigent doivent être, en toute chose, des valeurs de reconnaissance et d’exemplarité.

Quelles sont les actions prioritaires que vous souhaitez mettre en Å“uvre ?

Nous avons cette année d’importants chantiers à mener qui vont conditionner l’avenir de notre Université. Le premier d’entre eux concerne bien sûr le contrat quadriennal. Nous avons commencé à y travailler en 2008. L’évaluation de nos unités de recherche s’achèvera dans un mois ou deux, celle de notre offre de formation devrait se poursuivre quelques mois encore et ce travail s’achèvera à l’automne prochain avec l’évaluation de l’ensemble du fonctionnement de l’Université. Cette phase d’évaluation est primordiale mais la qualité et la richesse du projet que nous allons présenter pour les quatre années à venir le seront tout autant pour la réussite des négociations avec le Ministère.

L’autre chantier important de l’année concerne le passage à l’autonomie. Le changement du cadre législatif va conduire l’université à acquérir de nouvelles compétences, et avoir notamment la maîtrise globale de son budget et la responsabilité de la gestion de l’ensemble de ses ressources humaines. Le Ministère nous a signifié que ce transfert de compétence pourrait être opérationnel au premier janvier 2010. Nous allons donc nous y préparer, tout au long de l’année 2009, en nous appuyant sur les recommandations du rapport d’audit que l’IGAENR a mené aux mois de juin et juillet derniers. En ce qui concerne la gestion globale de notre budget, nous devons nous doter d’outils de gestion qui soient adaptés et performants. Il se trouve que nous avions anticipé ce point et programmé pour le 1er janvier 2010 le basculement de notre système actuel de gestion financière baptisé Nabuco pour un système plus performant et donc adapté à nos nouvelles prérogatives, SIFAC. Outre le déploiement de ce système, c’est l’ensemble de notre organisation en matière financière que nous devons adapter à cette nouvelle donne. C’est un très grand chantier qui mobilise déjà et va mobiliser encore jusqu’à la fin de l’année beaucoup de personnels de l’université mais nous avons toutes les raisons d’être confiants. Le point le plus délicat concerne en fait la gestion des ressources humaines. Le jugement de l’IGAENR sur le fonctionnement de l’Université en la matière était plus réservé. Le rapport pointait notamment un manque d’harmonisation des procédures, de centralisation des actes cruciaux de la gestion des ressources humaines, ainsi que des défaillances dans le système d’information de gestion des ressources humaines de notre établissement. Nous devons donc revoir complètement notre organisation, d’autant plus que nous allons devoir gérer entre sept et dix fois plus de personnel qu’avant. Jusqu’à présent en effet, nous gérions uniquement le personnel imputé sur le budget de l’établissement, c’est-à-dire essentiellement les contractuels, soit environ 10 à 15% de l’ensemble des personnels. Les nouvelles compétences incluent en outre la gestion de la masse salariale et de la paye des personnels permanents, des opérations qui ne souffrent et ne tolèrent aucune approximation. Le troisième défi que nous devons relever et qui est en fait induit par les deux points précédents concerne le système d’information. Notre Université doit se doter d’un système d’information global plus performant, qui permette l’interopérabilité des applications, et la mise en place de bases de données uniques. Là aussi, il va nous falloir avancer très rapidement.

Enfin, et même si je me suis déjà largement exprimé sur le sujet, je ne peux pas évoquer les grands dossiers en cours sans mentionner l’opération Plan Campus de Saclay. Le 24 février dernier, la Ministre a officiellement retenu notre proposition parmi les 10 projets qui vont être soutenus par le Ministère. Nous allons donc passer d’une phase conceptuelle à une phase opérationnelle. De très grands chantiers en perspective vont nous mobiliser largement. Si nous respectons le schéma prévu et si les financements le permettent, nous pouvons envisager l’implantation sur le plateau de l’ensemble des laboratoires et des formations de Master et de Doctorat en biologie, chimie et pharmacie en 2013.

Comment voyez-vous l’avenir de Paris-Sud 11 ?

Paris-Sud 11 bénéficie aujourd’hui de l’image d’une université d’excellence dont il ne s’agit évidemment pas de se satisfaire. Nous devons progresser et améliorer sans cesse notre visibilité. Il me semble que pour préparer au mieux notre avenir il y a d’autres chantiers qui, s’ils ne sont pas considérés comme prioritaires –au sens des actions immédiates- au même titre que ceux que je viens d’évoquer précédemment, n’en sont pas moins cruciaux et devront s’inscrire dans la durée. Le premier d’entre eux concerne la place des étudiants dans l’Université. Force est de constater aujourd’hui que ni la vie étudiante sur nos campus, ni la participation des étudiants à la vie de l’établissement ne sont suffisamment développées. Je pense qu’il ne faut pas se résigner et que nous devons intensifier nos efforts pour faire mieux. Le deuxième chantier concerne cette fois les futurs étudiants, ceux qui sont encore lycéens et à qui nous devons donner envie de venir se former chez nous. Ne nous voilons pas la face, toutes les projections font état d’une érosion des effectifs étudiants dans les filières scientifiques universitaires, pour ne pas dire sur l’ensemble des filières universitaires. Nous devons redoubler d’effort dans notre communication envers ces lycéens, en enrichissant et en diversifiant encore plus notre offre de formation mais aussi en leur montrant que la professionnalisation à l’université et à Paris-Sud 11 en particulier est une vraie réalité, qui est de mieux en mieux prise en compte. Nous pouvons faire état de taux d’insertion de très bonnes valeurs avec des métiers intéressants tant du point de vue de la vie professionnelle que des aspects matériels. Je suis convaincu que l’attractivité de notre Université vis-à-vis des étudiants doit être absolument renforcée.

Un autre élément qui me semble majeur pour notre avenir, c’est la richesse de notre pluridisciplinarité que nous devons absolument préserver. Nous avons beaucoup travaillé pour qu’elle se traduise concrètement dans des projets de recherche et de formation. Si nous avons pu y parvenir, c’est parce que nous avons la chance de couvrir un champ disciplinaire large. Nous devons conserver cet atout, et puisque j’ai parlé du plan campus, cela signifie notamment que nous devons veiller à renforcer, plus encore qu’avant, les liens entre le Pôle Orsay-Saclay et les autres pôles de l’université implantés sur d’autres sites géographiques comme la médecine, le  droit, l’économie et la gestion. Le développement de l’Université doit reposer notamment sur une stratégie d’identification de la très forte complémentarité Sciences-Santé au sein de Paris-Sud, où les sciences sociales auront toute leur place.

Enfin, je voudrais dire un mot aussi de l’importance qu’il y a aujourd’hui, pour un établissement, à nouer des partenariats plus forts pour être plus visible. Les opérations structurantes qui ont abouti à la création des PRES, à la labellisation de RTRA (Réseau thématique de recherche avancée), à la création de Fondations de Coopération Scientifique, ont pu sans doute paraître un peu complexes les unes par rapport aux autres, notamment parce que leur partition n’est pas très claire ; mais ce qui est certain, c’est que cette dynamique de structuration va prendre de l’ampleur et l’un des enjeux pour notre établissement est d’en être un élément moteur. Pour finir, je dirais que je souhaite que notre Université construise son propre modèle de fonctionnement et de développement universitaire, un modèle qui nous ressemble, celui que nous voulons être et non pas un modèle qui nous serait imposé.

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